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lundi 17 novembre 2008

Résultats de l'enquête sur les produits de la mer durable : forte participation !

Vous avez été exactement 410 à compléter l'enquête sur les produits de la mer durables, menée par Internet du 23 octobre au 5 novembre. Ce chiffre est en lui-même un premier enseignement : c'est un sujet qui vous intéresse. Voici donc les enseignements que l'on peut tirer :

Qui a répondu à l'enquête ?
410 réponses, c'est un échantillon statistiquement significatif. Ont ainsi participé 51% d'hommes (et donc 49% de femmes), soit un échantillon bien équilibré. Cible plutôt jeune également : 69% d'entre vous ont moins de 39 ans, avec un poids important des 25-34 ans (52%). Vous êtes également 52% à avoir des enfants. Enfin, le mode de diffusion a fait que l'enquête s'est adressée principalement à une cible plutôt CSP+ (cadres, professions libérales,...) et pour beaucoup située en région parisienne.

Il est intéressant de noter que cette cible correspond à une population a priori déjà surconsommatrice de produits bio, selon le "Baromètre de consommation et de perception des produits biologiques en France", publié chaque année par l'Agence Bio.

Quelle connaissance des enjeux du développement durable ?
L'échantillon est assez sensibilisé aux enjeux du développement durable : 43% des répondants déclarent avoir une connaissance du sujet "experte" ou "avancée", et même près d'1 homme sur 2 (48%), contre un peu plus d'1 femme sur 3 (38%). Parmi ces enjeux, ce sont les ressources naturelles, les effets de l'environnement sur la santé et le changement climatique qui sont jugés comme les plus importants.

Quelle place pour les achats "responsables" des produits de la mer ?
Alors que plus de la majorité des répondants réalise une part significatif de ses achats en produits durables (53%), cela ne concerne qu'environ 1 personne sur 4 pour les produits de la mer (26%). Le marché des produits de la mer reste donc en marge de l'essor important du marché du bio que l'on constate depuis quelques années...

Quelles sont les raisons de consommer durable ?
Les 2 principales raisons invoquées sont le respect de la planète (43%) et la santé (38%).
Les femmes sont un peu plus nombreuses que les hommes à faire ce choix parce que c'est meilleur pour la santé (42% contre 34%).
Quant à l'influence des enfants, elle est claire : on consomme durable pour la santé quand on a des enfants ( 48% contre 27% quand on n'a pas d'enfants) ; on consomme durable pour la planète quand on n'a pas d'enfants (50% contre 35% avec enfants).

Pourquoi on n'achète pas plus de produits labélisés ?
3 raisons principales à cela : 1/ l'offre trop limitée en magasin, ou l'absence de magasins bio près de chez eux ; 2/ le prix élevé des produits bio ; 3/ la multiplication des labels, source de confusion.

A noter également de nombreux commentaires pour déclarer une méfiance des labels, soit parce qu'on "ne croit pas que le produit avec label soit vraiment bio", soit parce qu'on considère que "les produits labelisés ne prennent pas en compte tous les enjeux". Dans ce dernier cas, on demande de la cohérence : on cite à titre d'exemple le cas de fruits bio d'origine lointaine avec emballage plastique, jugés pas forcément plus "durables" que des fruits non bio achetés en vrac, par exemple au marché, d'origine locale, "en faisant confiance à son maraîcher."

Qui connaît le label MSC pour la pêche durable ?
Seulement 6% des répondants déclarent connaître le label MSC (Marine Stewartship Council). C'est très peu. Le label MSC, qui est pourtant en train de devenir le label de référence au niveau mondial, reste encore confidentiel en France. Il est surtout connu d'experts du développement durable (87% de ceux connaissant le label déclarent une connaissance experte ou avancée) qui ont des enfants (78%). Comme attendu, ce sont des personnes qui achètent plus de produits durables que la moyenne et prêts à payer significativement plus que la moyenne.

En conclusion
Force est de constater que le chemin est encore long. Si la consommation responsable de certaines catégories jouit d'une bonne dynamique (fruits et légumes, café), les produits de la mer sont en retard de plusieurs années. Ces résultats semblent cohérents avec le niveau très limité de l'offre disponible actuellement dans les grandes surfaces, étals des marchés et des poissonneries : quelques produits labellisés MSC, un label encore majoritairement inconnu, ou bio (gambas, saumon fumé).

Au-delà, il semble que la notion même de "produit de la mer durable" soit génératrice de confusions dans l'esprit de beaucoup. Plusieurs commentaires qui m'ont été envoyés laissent penser que "les gens considèrent un poisson frais sur un étal comme naturellement durable et bon pour la santé". A cela, on peut avancer plusieurs explications, par exemple :
- Les sources de pollution passent inaperçues (PCB, métaux lourds, élevages intensifs), alors que le sujet des pesticides et des produits chimiques utilisés dans l'agriculture intensive sont très médiatisés
- Le problème de la surpêche est encore méconnu et mal appréhendé : la mer est invisible, on lui attribue encore des qualités de "d'abondance inépuisable".


Pour aller plus loin
- Le site de l'Agence Bio
- Le lien vers le Baromètre annuel de l'Agence Bio
- Un excellent article de Lester Brown : EXPANDING MARINE PROTECTED AREAS TO RESTORE FISHERIES
- Le site du Marine Stewartship Council
- Le site du WWF Marine Conservation et du WWF Marine Program
- Greenpeace Oceans
- Enfin, 2 livres référence sur le sujet : "Une mer sans poissons" de Philippe Cury (lien dans la rubrique "Lu et approuvé" à votre droite) ; "Surpêche : l'océan en voie d'épuisement" de Charles Clover)

Je serai ravi de pouvoir échanger avec vous sur les différents enseignements de cette enquête. Qu'en pensez-vous ?

Thomas

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Synthèse remarquable. Il y a plein d'opportunités

Anonyme a dit…

Je n'aurais pas imaginé des résultats aussi tranchés... qui montre qu'il y a du boulot, et que tu as choisi le bon créneau. En terme de médiatisation, je trouve vraiment fort l'argument "la mer n'est pas inépuisable, ne la surexploitons pas"

Sinon, le blog est sympathique, coloré, régulièrement actualisé... chapeau bas !

Thomas Canetti | Food4Good a dit…

Cher anonyme,

merci pour tes encouragements
A bientôt
Thomas

Anonyme a dit…

Pour commencer une anecdote. La semaine dernière j'étais au Naturalia et j'achetais des produits (Bio).
J'ai vu alors une mangue qui venait d'Amérique du Sud et je me suis posé la question :
Vaut-il mieux vraiment acheter une mangue Bio qui a fait 10 000 bornes ou une tomate "fabriquée" en
belgique avec pesticide et engrais ?

J'ai fini par ne pas acheter la mangue. Je n'ai pas acheté de tomate non plus. Je ne vois pas pourquoi je ne pourrai pas survivre sans mangue ou tomate. (j'avoue que j'en achète tout de même, même en hiver).

Bref, pour le poisson, c'est un peu la même chose. Un poisson label MSC fabriqué en Alaska est-il plus "durable" qu'une sardine provenant des côtes atlantiques françaises ?
"85% de la consommation francaise de produits de la mer est importée"
Je ne connaissais pas ce chiffre, mais nos étendues cotieres m'incitent à penser que ce chiffre finira par diminuer avec l'augmentation du coût des transports. Je ne pense pas que ce soit une fatalité. N'est-il pas possible de développer une pêche durable près de nos côtes ?
Le rendement écolopique ne serait-il pas bien meilleur ? N'y a t-il pas un marché pour ce type de produit ?
(N'y a t-il pas non plus un marché pour les jouets fabriqués en France plutot que des jouets fabriqués en Chine avec des produits chimique douteux ?)

Tu as probablement raison. Un poisson MSC d'Alaska, c'est très probablement mieux que de manger du thon rouge méditerranéen (l'auteur du Blog n'en a t-il jamais mangé ??)
Par contre, je ne suis pas totalement convaincu, qu'à l'heure actuelle -c'est à dire avec nos moyens de production d'energie-, cela soit véritablement durable.

Thomas Canetti | Food4Good a dit…

Cher Ypi,

Tu mets là encore le doigt sur un sujet important. Dans cette enquête, de nombreuses personnes ont ainsi soulevé la question entre des produits bio qui viennent de loin et du non bio mais local... Premier point à mon sens : cela dénote une vraie volonté de cohérence de la part des citoyens. On veut à la fois faire le bon choix pour la santé, mais aussi pour le climat, les ressources, etc... Sinon le choix est impossible, c'est un peu comme choisir entre papa et maman... L'initiative de Alter Eco avec son chocolat Bio + Equitable + Zero carbone est à ce titre tout à fait remarquable.

Comment donc prioriser entre du MSC d'Alaska et du pas MSC mais local ? Mon avis est le suivant. Le poisson ca touche aux problemes suivants : climat, ressources naturelles, biodiversité. J'ai tendance à penser que les problèmes les plus aigus sont dans l'ordre :
- ressources naturelles : la surpêche, qui fait que la morue a disparu de l'est du canada, que le saumon sauvage d'atlantique est presque disparu, et que le thon rouge est en voie d'extinction (la réduction de 20% sur les quotas décidée cette semaine n'y changera rien)
- biodiversité : les pêcheries de crevettes sont déguelasses pour les écosystèmes : non seulement elles détruisent les mangroves (nurseries de poissons), en plus elles sont pêchées avec des grands filets qui ramassent tout et n'importe quoi, et dont on ne garde que la crevette pour rejeter le reste mort à la mer
- climat : consommation des bateaux de pêche, du transport, de la congélation ; mais cela représente des émissions très très faibles comparées à d'autres secteurs
d'où ma préférence de privilégier du MSC surgelé d'Alaska à une espèce locale mais sans label.

Tu soulèves d'autres questions passionnantes, et je me concentrerai là encore sur le domaine des produits de la mer. Je te "rassure" d'ailleurs au sujet du thon rouge : je fais le maximum mais dans des sushi il est parfois difficile de ne pas en manger... Personne n'est parfait.

Tout d'abord la question ô combien importante des importations : pourrait-on s'en passer ? La France consomme environ 2 millions de tonnes de produits de la mer par an. Malgré ses étendues côtières, elle n'en "produit" que 780 000t (source Ofimer). D'ailleurs je préfère la notion de "cueillette" puisque la pêche est la dernière activité agricole humaine de ce genre (sauf pour l'élevage bien sûr). Environ 500 000 tonnes sont exportées, car nous pêchons peu, mais trop des mêmes espèces (thon, crevette, coquille st jacques, huitres) et d'espèces qu'on ne consomme pas localement (chinchard). Même en imaginant que nous consommions toute la cueillette, il nous manquerait donc 1.2 millions de tonnes... Les importations sont donc incontournables.

2e question : comment importer ?
Il faut en gros choisir entre le frais par avion ou camion et le surgelé par bateau. Je ne m'étendrai pas longtemps sur le sujet car la réponse est claire : le surgelé par bateau est beaucoup moins émetteur de gaz à effet de serre que le camion ou l'avion. Une étude anglaise montre d'ailleurs que les émissions d'un camion livrant des produits d'Ecosse à Londres sont supérieures à celles d'un bateau livrant des surgelés à Londres via la Chine... Une analyse de cycle de vie confirme cela même en prenant en compte les émissions liées à la congélation initiale et chez le client.

Que penses-tu de tout cela ?
Thomas